Le 10 décembre 1934 à midi, dans un café situé au 63 boulevard Saint-Germain à Paris, là où aujourd’hui est installé un fast-food, André Weil, l’un des plus talentueux mathématiciens de cette époque a rassemblé cinq collègues aussi passionnés que lui. A eux six, ils représentent les universités de Strasbourg, Nancy, Rennes et Clermont- Ferrand, à eux six, ils viennent de créer le groupe Nicolas Bourbaki dont les publications vont donner un formidable coup de modernité aux mathématiques et un immense élan à l’école française.
C’est à peu près dix ans auparavant que Raoul Husson, élève à l’Ecole Normale Supérieure, invente le personnage de Nicolas Bourbaki en s’inspirant du grand Charles Bourbaki qui servit en Crimée, en Algérie, en Italie avant de devenir gouverneur militaire de Lyon.Le premier groupe de cette société secrète est composé outre d’André Weil, d’Henri Cartan, Claude Chevalley, Jean Delsarte, Jean Dieudonné, René de Possel. La guerre les séparera. Dans les années quarante le groupe s’enrichira de l’arrivée de la future médaille Field, Laurent Schwartz et du génie Alexandre Grothendieck qui dans les années 90 partit vivre en ermite dans les forêts pyrénéennes.
Et aujourd’hui encore, bien que moins rayonnant, le groupe continue à se réunir avec de nouveaux membres. Bourbaki n’a pas seulement fait progresser les mathématiques mais a aidé Lévi-Strauss à formaliser le structuralisme et a même inspiré les membres de l’Oulipo dans leur recherche. Voici son étonnante et passionnante histoire.
Traduit de l'anglais par Phiippe Babo